
Corrèze jusqu’au 25 juin 2025 : consultation publique sur projet d’arrêté fixant une période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau du 1er juillet au 14 septembre 2025
9 juin 2025
Côtes-d’Armor jusqu’au 1er juillet 2025 : pas de période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau dans la consultation publique sur projet d’arrêté relatif à l’exercice de la chasse
12 juin 2025
Important : pour que votre avis soit pris en compte, utilisez nos arguments pour rédiger une réponse personnalisée.
Modalité de réponse à cette consultation :
- par e-mail : [email protected]
- Objet : Projet d’Arrêté n° PN-2025-42 autorisant l’exercice de la vénerie sous terre du blaireau pour une période complémentaire
- jusqu'au 27 juin 2025
Précision importante : tout le monde a le droit d’exprimer son avis sur ce projet d’arrêté, quel que soit son département de résidence.
Madame la préfète de l'Aisne,
Alors que le tribunal administratif d'Amiens a suspendu puis annulé l’arrêté du préfet de l’Aisne du 1er juin 2023 autorisant une période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau, la direction départementale des territoires de l'Aisne propose à la consultation du public un projet d’arrêté autorisant l'exercice de la vénerie sous terre du blaireau pour une période complémentaire du 1er juillet 2025 au 14 septembre 2025.
Je souhaite déposer un AVIS DÉFAVORABLE à votre projet d’arrêté.
SUR LA FORME :
- Dans les ordonnances 2301880, 2301858 et 2301859 rendues par le tribunal d'Amiens, on peut lire : « l’existence d’une période complémentaire de chasse décidée par l’arrêté attaqué est de nature à favoriser la méconnaissance, par les chasseurs, de l’interdiction légale de détruire les petits blaireaux. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l’article L. 424-10 du code de l'environnement doit être accueilli. » Votre projet d’arrêté prévoyant une ouverture anticipée de la vénerie sous terre du blaireau, il est illégal et sera de nouveau contesté devant le tribunal administratif.
- Vous rappelez que l’article R. 424-5 du Code de l’environnement permet au Préfet, sur proposition du directeur départemental de l'agriculture et de la forêt et après avis de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage et de la fédération des chasseurs, d'autoriser l'exercice de la vénerie du blaireau pour une période complémentaire à partir du 15 mai. Toutefois, vous omettez de rappeler que l’article L. 424-10 du Code de l’environnement dispose qu'il est interdit de détruire, d'enlever, de vendre, d'acheter et de transporter les portées ou petits de tous mammifères dont la chasse est autorisée, sous réserve des dispositions relatives aux animaux susceptibles d'occasionner des dégâts. C'est pourtant ce qui a motivé le tribunal à suspendre puis annuler votre précédent arrêté.
- Dans votre note de présentation, vous citez le rapport du sénateur Pierre Cuypers, sénateur qui n’a jamais caché sa proximité avec le lobby cynégétique et a rendu un rapport à charge contre le blaireau, rapport qui a été dénoncé par plusieurs de ses collègues, mais également par l’ANSES.
- Pour semer le doute dans la tête du contributeur, vous justifiez la légalité de votre projet d'arrêté par les décisions du Conseil d'Etat, et notamment celle du 28 juillet 2023. Pourtant, le conseil d'Etat rappelle que les chasseurs ont interdiction de tuer les petits blaireaux, conformément aux dispositions de l’article L. 424-10 du Code de l’environnement. La vénerie sous terre est une technique de chasse aveugle qui consiste à envoyer un chien dans le terrier pour acculer les blaireaux, puis détruire leur habitat pour les en extraire avant de les tuer. Dans plusieurs départements, la transmission par l’administration des chiffres des prises de blaireaux a prouvé que la vénerie sous terre conduit à la destruction des terriers et de l’ensemble de ses occupants, y compris des jeunes de l’année, dépendants et qui n’ont évidemment pas pu se reproduire. Le pourcentage de jeunes tués lors des opérations de vénerie sous terre peut dépasser 45% et s’ajoute à une mortalité déjà élevée chez les blaireautins. Cela conduit de plus en plus de tribunaux à suspendre et annuler les arrêtés permettant des périodes complémentaires de vénerie sous terre du blaireau.
- Vous vous permettez de citer des scientifiques pour justifier le sevrage des blaireautins lors de la période complémentaire. De l’avis de l’ensemble de la littérature scientifique, le blaireau est un « petit » tout au long de sa première année de vie. Le sevrage des blaireautins n’est que le passage d’une alimentation lactée à une alimentation solide, généralement fournie par la mère blairelle. Cette étape alimentaire n’a aucun rapport avec le passage à l’âge adulte des blaireautins, lesquels demeurent pleinement dépendants de leur mère jusqu’à la fin de leur premier automne. Cette information a été confirmée par le Professeur Timothy J. Roper, dont vous utilisez les écrits à mauvais escient. Autoriser l'ouverture anticipée de la vénerie sous terre est une infraction, qui conduit de plus en plus de tribunaux administratifs à suspendre et annuler les arrêtés concernés.
- Le scientifique François Lebourgeois a écrit dans Activités saisonnières et comportements du blaireau européen (Meles meles L.) en contexte forestier tempéré de feuillus de plaine : résultats de 11 ans de suivi journalier (2013-2023) : "Comme beaucoup de mammifères, le blaireau est donc une espèce « altriciale », c’est-à-dire que la croissance et le développement des jeunes nécessitent des soins postnaissance prodigués par des individus adultes (notamment la mère). Même après le sevrage (chez les mammifères « processus durant lequel une mère cesse définitivement d’allaiter son petit »), les jeunes restent dépendants des adultes pour les soins, les différents apprentissages liés à la recherche de la nourriture, aux comportements pour la cohésion des groupes, à l’entretien des terriers." Cet article est en accès libre et serait certainement une lecture plus enrichissante que les documents qui vous sont transmis par la fédération départementale des chasseurs.
- Vous vous hasardez à faire des estimations de populations de blaireaux sans avoir de données pertinentes pour démontrer que la vénerie sous terre n'est pas de nature à mettre en danger les populations de blaireaux de votre département. Vos données proviennent soit de sources officielles, mais datées de plus de 23 ans pour les plus anciennes et 13 ans pour les plus récentes, soit de données des fédérations de chasse. Outre le risque d'insincérité des données produites, les chasseurs ayant tout intérêt à multiplier le nombre de blaireaux présents sur leur territoire, leurs méthodes de comptage n'ont aucune valeur scientifique. Si vos méthodes de calcul sont contestables, la principale illégalité de votre projet d'arrêté repose sur le fait que vous n'êtes pas en capacité de démontrer que l'ouverture d'une période complémentaire de vénerie sous terre est indispensable dans votre département. Je vous rappelle que la vénerie sous terre peut être pratiquée légalement de mi septembre au 15 janvier chaque année, et que son ouverture anticipée doit être justifiée par autre chose que l'envie d'un groupe de chasseurs de pratiquer une chasse de loisir avant l'ouverture générale de la chasse.
- De l’aveux même des chasseurs, la vénerie sous terre est une chasse récréative qui n’a pas d’objectif de régulation. Pourtant, il semble que les 22 équipages de votre département font suffisamment pression sur votre administration pour que vous envisagiez d'autoriser une ouverture anticipée de la vénerie sous terre, alors même que vous risquez une nouvelle condamnation par le tribunal administratif.
- Concernant la tuberculose, contrairement aux allégations des chasseurs, l’ANSES a rappelé que la lutte contre la tuberculose bovine ne justifie pas l’élimination préventive du blaireau. La Dordogne expérimente actuellement la vaccination des blaireaux pour lutter contre la tuberculose bovine, suite au succès de ce programme en Irlande.
- La note argumentaire de la FDCA montre que dans votre département, la vénerie sous terre ne représentait pour la saison 2022/2023 que 6,6% des blaireaux morts de cause anthropogénique. Il est donc faux d’affirmer que la vénerie sous terre est indispensable.
- L’article 9 de la Convention de Berne n’autorise les dérogations à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées qu’« à condition qu’il n’existe pas une autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas à la survie de la population concernée pour prévenir des dommages importants aux cultures, au bétail, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et aux autres formes de propriété ». Pour être légales, les dérogations à l’interdiction de porter atteinte aux blaireaux doivent être justifiées par trois conditions, devant être cumulativement vérifiées : la démonstration de dommages importants aux cultures notamment ; l’absence de solution alternative ; l’absence d’impact d’une telle mesure sur la survie de la population concernée. L’exercice récréatif de la chasse est exclu. Or, les éléments mis à disposition des contributeurs n’apportent aucun élément pour justifier l’ouverture d’une période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau. Vous ne fournissez aucune estimation sérieuse des populations de blaireaux dans le département et ne partagez aucun document pour vérifier la véracité des dégâts exposés (nature, récurrence, localisation et coûts). Par ailleurs, vous vous contentez de rejeter les mesures préventives qui pourraient solutionner les rares dommages causés par ces animaux. Dans ces conditions, rien ne justifie la période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau et le projet d’arrêté est donc entaché d’illégalité.
- La note des chasseurs affirme que tous types de prélèvements confondus, les prélèvements ont progressé de 202% sur les 5 dernières saisons cynégétiques. La pression de la chasse sur cette espèce est donc très importante (1 400 prélèvements revendiqués chaque année), alors que vous reconnaissez ne pas connaitre les effectifs de blaireaux dans le département.
- Vous tentez de justifier l’ouverture anticipée de la vénerie sous terre du blaireau par les risques de collision routière ou les dommages aux infrastructures. Pourtant, vous savez que la vénerie sous terre ne peut en aucun cas répondre à ce genre de problématique, ne pouvant pas être réalisée à proximité des voies ferrées, des routes ou des digues. Seules des solutions permettant un renforcement des ouvrages et la création de terriers artificiels permet de résoudre ces cas précis. Concernant les collisions routières, les blaireaux comme les autres animaux sauvages en sont les principales victimes. Il convient de diminuer la vitesse de circulation dans les zones concernées, et non de les tuer préventivement, ce qui est une aberration totale.
- Dans l’introduction de votre projet d’arrêté, on peut lire : « VU l’avis favorable de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage du 18 avril 2025 ». Vous précisez même que la CDCFS s'est prononcée à l'unanimité pour une ouverture au 15 juin. Chacun sait que ces commissions sont déséquilibrées et que les représentants d'intérêts cynégétiques y siègent en large majorité. La publication d'un compte-rendu de la CDCFS aurait permis au contributeur de savoir quelle a été la nature des débats et les éventuelles oppositions soulevées contre votre projet d'arrêté. Les associations de protection de l'environnement étaient-elles présentes ? De plus, l'avis de la CDCFS est seulement consultatif, et il est de votre responsabilité de faire respecter la loi et de ne pas céder aux chasseurs, alors que vous savez que votre arrêté sera une nouvelle fois attaqué devant le tribunal administratif.
- Je me permets de vous rappeler qu’au moment de la publication de l’arrêté final, l’article L 123-19-1 du code de l’environnement stipule qu’ « au plus tard à la date de la publication de la décision et pendant une durée minimale de trois mois, l’autorité administrative qui a pris la décision rend publics, par voie électronique, la synthèse des observations et propositions du public avec l’indication de celles dont il a été tenu compte, les observations et propositions déposées par voie électronique ainsi que, dans un document séparé, les motifs de la décision. » Je vous remercie donc de bien prévoir la publication d’une synthèse des avis qui vous ont été envoyés.
LES JURISPRUDENCES EN FAVEUR DU BLAIREAU :
Suite aux recours en justice déposés par les associations, les juges des tribunaux administratifs donnent de plus en plus souvent raison aux associations.
Dans leurs ordonnances, les tribunaux administratifs justifient la suspension ou l’annulation des arrêtés pour les motifs suivants :
- Insuffisance de démonstration de dégâts
- Illégalité destruction « petits » blaireaux
- Défaut de recours à des mesures alternatives à l’abattage
- Insuffisance de justifications dans la note de présentation
- Méconnaissance de l’état des populations de blaireaux
- Défaut de fixation d’un nombre maximal d’animaux susceptibles d’être prélevés
- Irrégularité de la convocation des membres de la CDCFS
- Risque sanitaire lié à la tuberculose bovine
- Illégalité de l’article R.424-5 du code de l’environnement
- Non respect de l’équilibre agro-sylvo-cynégétique
- Maturité sexuelle des petits non effective
- Insuffisance de démonstration de dégâts aux infrastructures
SUR LE FOND :
- Suite aux recours des associations, de plus en plus de départements reconnaissent l'illégalité des périodes complémentaires de vénerie sous terre du blaireau et ne les autorisent plus.
- Cette pratique, appelée « vénerie sous terre », est particulièrement barbare et cruelle. Elle inflige de profondes souffrances aux animaux puisqu’elle consiste à acculer les blaireaux dans leur terrier à l’aide de chiens, puis, pendant plusieurs heures, à creuser afin de les saisir avec des pinces. Les animaux, dans un état de stress très important, sont ensuite achevés à la dague.
- La vénerie sous terre met en danger les chiens qui sont envoyés dans les terriers et qui peuvent être blessés, répandre des zoonoses ou être tués par les animaux sauvages qui se défendent d’une agression extérieure. D’ailleurs, la Suisse a interdit cette pratique dans le but de protéger les chiens.
- La vénerie sous terre n’est pas sans conséquences pour d’autres espèces sauvages. En effet, une fois l’opération terminée, les terriers, souvent anciens, se trouvent fortement dégradés. Or ces derniers sont régulièrement utilisés par d’autres espèces, dont certaines sont réglementairement protégées par arrêté ministériel et directive européenne, comme le Chat forestier (Felis silvestris) pour les départements concernés ou des chiroptères lorsque certaines espèces sont en phase d’hibernation pendant la période de septembre/octobre à fin avril : « Le Petit rhinolophe hiberne dans des gîtes souterrains (mines, caves, sous-sols ou même terriers de Renard ou de Blaireau) »source : Atlas des Mammifères de Bretagne éd. 2015.
- Le Conseil de l’Europe recommande d’interdire le déterrage : « Le creusage des terriers, à structure souvent très complexe et ancienne, a non seulement des effets néfastes pour les blaireaux, mais aussi pour diverses espèces cohabitantes, et doit être interdit. »
À PROPOS DU BLAIREAU :
- Les populations de blaireaux sont fragiles et souffrent de la disparition de leurs habitats (haies, lisières, prairies, …) et sont fortement impactées par le trafic routier.
- Inscrit à l’annexe III de la Convention de Berne, le Blaireau d’Europe, Meles meles, est une espèce protégée (cf. art. 7). A titre dérogatoire, la Convention de Berne encadre strictement la pratique de la chasse et la destruction administrative de cette espèce (cf. art. 8 et 9). Le ministère de l’écologie doit soumettre « au Comité permanent un rapport biennal sur les dérogations faites ».
- La dynamique des populations de blaireaux est extrêmement faible (moyenne de 2,3 jeunes par femelle et par an).
- Cette espèce n’est jamais abondante (mortalité juvénile très importante (de l’ordre de 50% la 1ère année).
- Une mortalité importante de blaireaux est liée au trafic routier.
- Les opérations de vénerie peuvent affecter considérablement les effectifs de blaireaux et peuvent entraîner une disparition locale de cette espèce.
- Les dégâts que le blaireau peut occasionner dans les cultures de céréales sont peu importants et très localisés, essentiellement en lisière de forêt. Selon l’Office National de la Chasse ONC bulletin mensuel n° 104 : « Les dégâts que peut faire le blaireau dans les cultures ne sont gênants que très localement (…) Et il suffit de tendre une cordelette enduite de répulsif à 15 cm du sol pour le dissuader de goûter aux cultures humaines. »
- En ce qui concerne les éventuels dégâts causés sur les digues, routes ou ouvrages hydrauliques par le creusement des terriers, la régulation du blaireau a montré son inefficacité, voire même un effet contre-productif du fait de la place libérée par l’animal éliminé qui est très vite occupée par un autre individu.
- Une méthode simple et pérenne consiste à utiliser des produits répulsifs olfactifs sur les terriers posant problème, ceci accompagné de la mise à disposition à proximité de terriers artificiels. Les avantages de cette solution sont que les animaux continueront d’occuper un territoire sur le même secteur et ne permettront pas l’intrusion d’un nouveau clan. (source : LPO Alsace)