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14 janvier 2024C’est sans surprise que nous apprenons que la Commission Européenne présentait le 20 décembre 2023 une demande du Conseil visant à adapter le statut de protection du loup au titre de la convention internationale de Berne relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe, à laquelle l’UE et ses États membres sont parties. C’est un travail de sape qui a commencé il y a plusieurs mois, et qui risque d’aboutir si les citoyens européens n’affichent pas clairement leur soutien à une biodiversité qui englobe aussi les grands prédateurs.
La plupart des pays européens qui hébergent une population de loups tentent en effet, depuis plusieurs années, de restreindre le nombres de meutes en dépit de la protection légale dont le loup bénéficie en Europe. Si en France, nous protestons régulièrement contre les Plans Nationaux Loup et les quota d’abattage (au 20 décembre 2023, 198 loups ont été abattus « légalement »), notre pays n’est pas le seul concerné par cette volonté de limiter le nombre de loups sur un territoire.
Cela démontre plusieurs choses, que nous dénonçons depuis des années : la méconnaissance de la biologie du loup (les différents gouvernements n’ont jamais souhaité financer d’étude scientifique de terrain indépendante) et le poids des lobbies. Les syndicats agricoles refusent toujours de poser les bases d’une cohabitation avec les grands prédateurs, et malgré que le loup est maintenant présent en France depuis 30 ans, le retard accumulé dans le domaine de la protection des troupeaux et des méthodes d’effarouchement est considérable (idées reçues et fausses affirmations relatives à la non protégeabilité des troupeaux de bovins, de la non efficacité des moyens d’effarouchement, quand ce n’est pas tout simplement la non mise en place des moyens de protection, ou le faux débat sur la dangerosité des chiens de protection des troupeaux). Il faut désormais ajouter le lobby de la chasse, qui s’était plus ou moins fait discret il y a encore quelques années mais qui n’hésite plus à s’inviter dans le débat. Nous vous livrons un exemple parmi d’autres : dans une motion votée à l’unanimité le 15 avril 2023, la fédération départementale de la Drôme exigeait l’abattage de 100 loups pour la saison 2023-2024, accusant le prédateur d’être responsable de la disparition du mouflon et d’une baisse de 20 à 40 % des populations de chamois, cerfs, chevreuils et sangliers dans le département.
Mais revenons en Europe où la situation n’est guère plus brillante.
Rappelons-nous par exemple, que le 7 mai 2022 la majorité des membres du parlement de la Suède, le Riksdag, ont voté en faveur d’une extermination de près de la moitié des loups de leur territoire. D’après l’inventaire de l’agence publique de protection de la Suède, le Naturvårdsverket, sur l’année 2020-21, approximativement 480 loups étaient présents en Scandinavie. Et en février 2023, les autorités ont accordé aux chasseurs un quota de 75 loups à abattre, sur une population totale estimée à 460 animaux.
En novembre 2023, l’Agence estonienne pour l’environnement a fixé le quota d’abattage à 144 loups, soit environ 30 % de la population totale. Dans ce pays aussi, la parole des scientifiques ne pèse pas lourd, et les éleveurs qui protègent leurs troupeaux sont une faible minorité.
Les ides reçues relatives aux loups sont nombreuses, et l’une d’elle revient régulièrement : la population de loups en Europe n’est pas en danger, il est donc permis d’en abattre un certain nombre par pays. Cela signifierait que les loups respectent donc les frontières humaines et s’arrangent pour mourir de vieillesse !
Evidemment, la réalité est tout autre. Dans chaque pays européen ou presque, les loups doivent composer avec un pourcentage plus moins élevé de braconnage, y compris dans notre propre pays, qui mériterait une étude approfondie. A cela s’ajoutent les morts accidentelles causées par les activités et infrastructures humaines ( collisions routières, ferroviaires), la fragmentation de leurs territoires (urbanisme, routes) et le changement climatique (sécheresses, incendies) qui déstabilisent des écosystèmes entiers et modifie le régime alimentaire des loups. Dans ce contexte, les loups ont plus de chance de prédater des animaux domestiques, – rappelons-le, peu ou mal protégés dans leurs immense majorité.
S’agissant des déplacements des loups et de l’existence des meutes frontalières, nous aimerions citer le cas de la Suisse. Dans ce pays, des associations locales se battent pour empêcher le massacre de 70 % de la population totale de loups. Réduire drastiquement la population de ces prédateurs, c’est aussi mettre en danger le patrimoine génétique et réduire les chances de maintenir une population stable et saine en Europe. Les loups se déplaceront de la Suisse à la France et à l’Italie et même plus loin.
Aussi, la demande de la présidente de la Commission Européenne est éminemment critiquable, non seulement parce qu’elle est dangereuse pour les populations de loups, mais aussi parce qu’elle démontre, s’il en était besoin, que les décisions relatives à la protection des espèces sauvages sont totalement déconnectées de toute réalité scientifique et subordonnées aux exigences des lobbies de tout bord. Et cela est inacceptable.
Cette lettre ouverte a été co-signée par 300 ONG dont AVES. Nous espérons encore qu’une possibilité de sauver les loups d’Europe existe.
Open Letter against Switzerland’s wolf cull – reduced file size – dec 23 (1)