La chasse, un non-sens et une hérésie au XXIème siècle en France
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30 mars 2023
Le tribunal administratif d’Amiens vient de clore ce 23 mars un feuilleton à rebondissements à propos d’un arrêté de l’Oise autorisant l’abattage de 1700 renards dans le département. La juge a tranché: l’arrêté était illégal !
Retour sur les faits. L’affaire remonte au début de l’été 2021. Dans le cadre de notre travail de veille sur la publication des projets d’arrêtés liés à la chasse, nous avions trouvé un arrêté préfectoral isolé daté du 24 juin 2021. Celui-ci autorisait un lieutenant de louveterie à réguler le renard (y compris de nuit) du 15 juillet au 31 décembre 2021 sur le territoire d’une circonscription de louveterie de l’Oise. Après vérification, cet arrêté avait été envoyé directement aux mairies des communes concernées sans que celui-ci n’ait fait l’objet d’une consultation publique ni d’aucune publication au recueil des actes administratifs de la préfecture.
Sur la base de ces seuls faits, nous savions déjà que cet arrêté était illégal et qu’il y a avait ici une volonté manifeste d’autoriser les abattages de renards le plus discrètement possible pour éviter une éventuelle requête en justice des associations environnementales. La préfète de l’Oise, Corinne Orzechowski, n’ignorait sans doute pas que son arrêté souffrait d’une carence d’arguments étayés pour le justifier. Ses craintes étaient justifiées puisqu’un arrêté similaire autorisant des tirs sur les renards par les lieutenants de louveterie, publié en 2019, avait déjà été annulé par la cour administrative d’appel de Douai. Le recours avait été porté par nos amis de l’ASPAS.
Suite à cette décision de justice prononcée, la préfecture, obstinée à vouloir satisfaire les demandes des chasseurs, avait alors contre-attaqué l’année suivante, en 2020. Au lieu de prendre un arrêté global, elle avait scindé ses arrêtés en autorisant des opérations d’abattage de renards par des arrêtés délimités par circonscription de louveterie. Ces multiples arrêtés étaient au final identiques à celui qui avait été annulé l’année précédente, tant sur ses motifs que sur sa durée; il avait simplement été géographiquement fragmenté. Malheureusement, l’existence de ces arrêtés pris en catimini, c’est-à-dire sans consultation publique et sans publication sur le site de la préfecture, n’ont été découverts que l’année suivante lorsque nous avons poussé plus loin nos investigations suite à la découverte du premier arrêté en juillet 2021. La préfecture avait réussi à berner les associations une première fois, alors celle-ci avait voulu récidiver en utilisant la même méthode ! Nous avons alors entrepris de contacter les mairies des autres circonscriptions de louveterie du département afin de nous procurer les autres arrêtés. La pelote de laine déroulée, nous avons rassemblé pas moins de huit arrêtés pris de la même façon…
Au total, 1370 renards devaient être abattus illégalement entre le 15 juillet et le 31 décembre 2021. Ce procédé inadmissible a fait l’objet d’un recours gracieux de la part de notre association, et le ministère a été averti des procédés mis en œuvre par cette préfecture décidément peu scrupuleuse.
La préfète avait alors été contrainte d’annuler ses arrêtés illégaux… pour en publier un autre autorisant cette fois-ci l’abattage de pas moins de 3000 renards par 15 lieutenants de louveterie ! Suite au tollé médiatique qui s’ensuivit, la préfecture avait finalement revu ses ambitions à la baisse en autorisant le 13 septembre 2021 le tir de “seulement” 1700 renards. L’arrêté fut attaqué dès sa publication par les associations. Le juge du TA d’Amiens avait prononcé dans l’urgence la suspension de l’arrêté dans l’attente du jugement au fond. Toute opération d’abattage était alors interdite dans l’attente d’une prochaine audience au Tribunal administratif d’Amiens.
Celle-ci s’est déroulée le 9 mars 2023. Le 23 mars dernier, les conclusions de la juge sont sans appel: elle a considéré que la préfecture était incapable de justifier les dégâts qu’elle imputait aux renards et que celle-ci ne respectait pas les conditions fixées par l’article L.427-6 du code de l’environnement. En conséquence, elle a prononcé l’annulation de l’arrêté.
Plus de détails sur l’annulation dans la publication de l’ASPAS.
À l’époque des faits, notre association n’était pas encore agréée au titre de la protection de l’environnement par le Ministère de la transition écologique. Aussi, alors que l’arrêté a d’abord été suspendu, puis annulé par la justice administrative, qui a donc reconnu son illégalité, AVES France ne sera pas remboursée des frais engagés. C’est pourtant le travail de veille de nos bénévoles ainsi que nos recours qui ont permis de mettre la préfecture de l’Oise face à ses responsabilités. Conscients du risque que nos écritures puissent être invalidés pour défaut d’intérêt à agir, nous avions déposé notre recours avec l’ASPAS. Même si nous célébrons aujourd’hui cette victoire, de nombreuses autres batailles juridiques sont en cours et s’annoncent pour 2023. Désormais agréée au titre de la protection de l’environnement à l’échelon national, AVES France bénéficie d’un intérêt à agir sur l’ensemble du territoire et se battra, à l’avenir, à armes égales contre les préfectures et les fédérations de chasse.